Amour

On aime de tout son être, de tous ses sens, avec son mental et son métabolisme, on parle même de l’activation de douze aires cérébrales favorisant le sentiment amoureux. Une grande quantité de diverses hormones se trouve libérée par l’amour. Cependant, le rôle du cerveau et des hormones ne peuvent probablement pas tout expliquer. Comment expliquer l’attirance pour un type de personne en particulier : des yeux clairs, une personnalité extravertie ou généreuse ?

Notre parcours de vie nous oriente également vers le choix d’un partenaire de manière consciente ou inconsciente. Certains y voient la réalisation du complexe d’Électre, d’autres d’Œdipe, pour d’autres, cela s’apparenterait plutôt à la recherche de la personne qui synthétiserait l’ensemble des personnes aimées. Il semble évident que le processus qui consiste à « tomber amoureux » demeure très complexe.

Lorsque l’on savoure la découverte de l’autre et l’émerveillement de la rencontre, comment pourrait-on imaginer qu’à l’intérieur de nous résonne un feu d’artifice de connexions neuronales et de déclenchement d’hormones ?

Je me suis toujours demandée pourquoi nos ancêtres avaient choisi le terme « tomber » pour décrire la naissance du sentiment amoureux, mais je réalise que le sentiment amoureux s’apparente bien à l’action d’être attiré (vers le sol) et de perdre son équilibre. En effet, lorsque nous tombons amoureux, nos hormones bouleversent notre équilibre et nous nous sentons complément attiré et happé par la personne qui nous plaît. Nous voulons aimer et être aimé en retour. En cas d’absence de réciprocité, il faut éviter de croire aux philtres d’amour, car le mélange « ocytocine, dopamine, phényléthylamine » ne se fabrique pas à la demande. Il faut laisser faire le destin voire éventuellement le provoquer pour gagner du temps d’amour.

Alors concrètement comment tombe-t-on amoureux ? Nous allons voir que le cerveau, les hormones et l’odorat peuvent jouer un rôle déterminant dans le processus de la naissance du sentiment amoureux. 

On ne tombe pas amoureux avec notre cœur, mais avec notre cerveau

Quand nous rencontrons une personne qui nous plaît, cela déclenche des stimuli dans tout notre corps. Nos sens se trouvent alors en éveil : on découvre l’odeur de l’autre, s’il porte un parfum, on observe ses gestes, son niveau de stress, le moindre contact, même un effleurement peut nous envoyer un petit électrochoc dans le bas du dos, et enfin, on entend sa voix prononcer notre prénom pour la première fois.

La puissance du sentiment amoureux atteint un niveau comparable à la faim et à la soif par rapport aux stimuli analysés par le cerveau.

Avez-vous déjà ressenti ce que l’on nomme « le coup de foudre » face à une personne que vous découvrez pour la première fois dans votre champ de vision ?

Le cas échéant, vous avez dû vous sentir foudroyé et en même temps gêné de ressentir un sentiment d’attirance si intense et si inexplicable.

L’explication se situe pourtant à l’intérieur de votre cerveau, plus précisément dans la zone des récepteurs de neurotransmetteurs. Des récepteurs opiacés permettent de moduler la réponse à la douleur, le stress et le contrôle des émotions. Le système opioïde cérébral joue un rôle essentiel pour trouver un partenaire attirant. Pour mettre en évidence l’intervention de ces récepteurs dans le mécanisme d’attirance, une étude a été organisée sur deux groupes d’hommes qui ont été séparés : le premier groupe dont on a inhibé les récepteurs opiacés et le second groupe avec des récepteurs opiacés fonctionnels. La réaction neuronale de ces hommes hétérosexuels a été analysée lors du visionnage de photos de femmes considérées comme « séduisantes ».

Cette expérience a permis de constater la faible réaction neuronale des hommes du premier groupe par rapport à celle du second groupe. Cela signifie donc que les hommes privés du fonctionnement normal de leurs récepteurs opiacés ont été peu attirés par les femmes qui semblaient pourtant susceptibles de leur plaire.

Concrètement, notre cerveau nous permet, ou pas, de nous sentir attiré par une personne. Notre cerveau agit même certainement comme l’organe le plus rapide de notre corps pour détecter l’attirance pour une personne. C’est pourquoi, dans un transport en commun, à peine réveillé en se rendant à son travail, nous pouvons nous sentir transi par un coup de foudre pour un inconnu, éventuellement même sans le voir, simplement attiré par son odeur. 

On ne tombe pas amoureux avec notre cœur, mais avec notre odorat

« Un soir, à la brune, il avait trouvé sur le banc que « M. Leblanc et sa fille » venaient de quitter, un mouchoir. Un mouchoir tout simple et sans broderie, mais blanc, fin et qui lui parut exhaler des senteurs ineffables. Il s’en empara avec transport. »

Les Misérables, Victor Hugo

Relié aux amygdales et aux hippocampes, le nez communique avec les zones qui habitent les émotions et la mémoire. Ces deux éléments intrinsèquement liés à l’amour jouent un rôle important dans le processus de la naissance d’un sentiment amoureux par l’intermédiaire de l’odorat. De manière inconsciente, l’odeur d’une personne peut évoquer de beaux souvenirs et déclencher des émotions agréables. Les odeurs naturelles et corporelles peuvent attirer des partenaires potentiels. Le corps peut donc produire une sorte de parfum unique. En l’occurrence ce phénomène permet de préserver l’espèce humaine en provoquant le désir sexuel qui permet d’assurer la reproduction.

On peut distinguer des odeurs plaisantes : l’odeur du vétiver, du réglisse, de la vanille, cependant nous ne pouvons pas sentir les molécules inodores qui sont fabriqués par le corps, il s’agirait des phéromones. Il s’agit surtout d’un mode de communication pour les insectes et pour les animaux. Les preuves de l’existence des phéromones humaines paraissent trop controversées pour être abordées davantage. Cependant, la science a pu affirmer le rôle d’autres hormones dans le processus de la naissance de l’amour.

On ne tombe pas amoureux avec notre cœur, mais avec nos hormones de l’amour

Sans le savoir, nos hormones féminines et masculines, testostérone et œstrogène, nous incitent ou nous dissuadent d’entreprendre une relation amoureuse avec un partenaire potentiel. L’intervention secrète de nos hormones peut conduire à un choix complètement irrationnel : ainsi nous pouvons ressentir de l’attirance pour une personne qui pourtant ne correspond pas à nos « critères ». Cela peut ainsi conduire à la formation de couples que tout oppose : convictions divergentes sur le mode de vie, la politique, la gestion de l’argent, etc. Nos hormones peuvent ainsi nous aider à nous débarrasser de nos hypothétiques attentes et de nos listes à cocher afin de trouver le bon partenaire.

Le début d’une relation amoureuse déclenche la dopamine dans notre corps, ce qui entraîne une sensation de bien-être, de plénitude et d’harmonie. Le simple fait de tomber amoureux libère la dopamine. Il s’agit de l’hormone de la « récompense ». On parle souvent de cette hormone quand on aborde le fonctionnement de certains sites comme les réseaux sociaux. Le déclenchement de cette hormone se trouve démultiplié quand il s’agit d’applications de rencontres. Concrètement, le fait de recevoir des « likes » et de « matcher » avec quelqu’un provoque un sentiment de bien-être grâce à la dopamine. Cette hormone transmet également des sensations de désir et d’excitation dans le corps. La dopamine, connue sous le nom de « l’hormone du plaisir », s’active notamment dans d’autres circonstances : par le fait de ressentir des moments agréables : manger un aliment très apprécié, pratiquer une activité artistique ou écouter de la musique…

Cette hormone diminue également l’anxiété, cela semble très pratique pour aborder sereinement un “date” ou pour se sentir en capacité d’aller parler à un inconnu. Elle doit certainement aussi contribuer à donner l’impression de vivre un rêve éveillé après une rencontre amoureuse bouleversante. En revanche, la dopamine peut aussi déclencher l’euphorie. Les conséquences peuvent d’ailleurs compliquer l’évolution d’un sentiment amoureux. Les personnes qui agissent et ressentent avec intensité, comme les hypersensibles et certains atypiques, peuvent se sentir envahir par une vague de sentiments incontrôlables et peuvent préférer éviter ces montagnes russes émotionnelles en mettant fin à la relation. À l’opposé, certaines personnes euphoriques et passionnées peuvent trop s’investir dans une relation à peine entamée et faire fuir leur éventuel partenaire.

Quand on tombe amoureux, cela déclenche une autre hormone déterminante dans le processus du sentiment amoureux, il s’agit de l’ocytocine. Elle est secrétée par les contacts tactiles et la tendresse physique. Cette hormone procure également une sensation de bien-être, elle aide à se sentir détendu et augmente la confiance en soi et en l’autre. Cette hormone qualifiée de molécule de l’attachement est aussi déclenchée lors de l’allaitement ce qui permet de renforcer le lien d’attachement entre la mère et l’enfant.  

Une autre hormone contribue également à la naissance d’un sentiment amoureux, il s’agit de la phényléthylamine. Cette hormone appartient aux amphétamines, un terme souvent associé à la pratique intensive des sportifs. Cette hormone déclenche également de l’euphorie et une sensation de bien-être et permet de se sentir moins inhibé. Elle augmente aussi l’hyperactivité. Cela peut ainsi s’avérer difficile à gérer pour les personnes qui ont un TDA/H.

Alors que la dopamine, l’ocytocine et la phényléthylamine libèrent un sentiment de bonheur et des papillons dans le ventre, d’autres hormones interviennent dans le mécanisme de l’amour mais déclenchent surtout des effets négatifs. 

Attention aux hormones qui peuvent tout gâcher

Au moment d’une rencontre amoureuse, le corps déclenche un excès de cortisol, communément appelée « l’hormone du stress ». Cette hormone provoque de nombreuses conséquences dans la vie de la personne amoureuse. Elle provoque de l’anxiété, elle perturbe le sommeil, elle dérègle l’appétit, et pour finir elle déclenche des problèmes gastriques. Par conséquent, ces désagréments peuvent complètement ruiner le début d’une relation. La personne amoureuse peut perdre complètement le contrôle parfois au point de développer des troubles obsessionnels compulsifs (TOC) : par exemple le fait de prendre plusieurs fois des douches ou de se laver les dents en permanence pour atteindre une hygiène irréprochable.

Vous pouvez traiter les problèmes de sommeil, de stress, d’appétit etc. pour reprendre le contrôle sur votre corps avant que cela ne devienne ingérable.

Il faut aussi se méfier des conséquences provoquées par une autre hormone : la sérotonine. Quand on tombe amoureux, la diffusion de cette hormone chute et cela entraîne la diminution de nos capacités de raisonnement. Cela provoque également une montée d’anxiété, de maladresse et parfois un état obsessionnel. Le manque de sérotonine déclenche surtout la sensation de perdre le contrôle. Au début d’une relation amoureuse, on apprend progressivement à découvrir l’autre. On s’interroge souvent sur la réciprocité de nos sentiments et sur la volonté d’investissement de l’autre. Cela peut rendre « fou » d’attendre des nouvelles de l’autre ou d’attendre un geste d’engagement de sa part. Cet état inconfortable de doutes et d’interrogations peut s’expliquer en partie par la diminution de sérotonine dans notre corps. Par conséquent, prendre de la hauteur et laisser du temps et de l’espace à l’autre semble indispensable pour ne pas laisser nos peurs prendre le dessus sur la construction de la relation.

La naissance des sentiments amoureux paraît très éloignée de la vision stéréotypée du coup de foudre réciproque entre deux personnes qui se cherchaient depuis toujours et qui s’engagent à s’aimer pour la vie. Le processus de l’amour déclenche inévitablement des hormones qui pourront faciliter la relation mais aussi des hormones aux conséquences plus négatives et difficiles à gérer. Par conséquent, la naissance de l’amour se retrouve souvent corrélé avec des sentiments plus torturés et plus sombres : le doute, la peur, l’angoisse… L’objectif d’amour idyllique se retrouve alors entaché d’une zone d’ombre.

Quand nous rencontrons une personne qui nous plaît, nous pouvons en principe lister de manière rationnelle les caractéristiques qui nous attirent chez elle : sa personnalité, l’intonation de sa voix, sa silhouette, la couleur de ses yeux, la forme de ses mains…

Pourtant, on entend fréquemment parler du rôle primordial du cerveau, mais aussi des « hormones de l’amour », ainsi que du rôle de l’odorat. Il semblerait même que le processus qui nous conduirait à tomber amoureux* s’inscrirait uniquement dans un mécanisme chimique. L’impression de connaître les raisons qui nous attirent chez une personne se heurterait donc à cette réalité. Alors concrètement comment tombe-t-on amoureux ? J’ai essayé de répondre à cette grande question de l’amour. Nous pouvons retenir que le processus de la création du sentiment amoureux est très difficile à appréhender et que cela dépend d’un ensemble d’éléments que nous ne pouvons pas maîtriser.

 

* Malgré le soutien d’Atypikoo pour l’écriture inclusive, elle n’est pas utilisée dans l’article pour faciliter la lecture

Publié par Delphine

Delphine est la cofondatrice du réseau social de rencontre Atypikoo et l'auteure du livre "Dating Authentique". Depuis plusieurs années, Delphine explore, à travers ses écrits, les spécificités des personnes neurodivergentes et leurs interactions amoureuses.
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