Avec l’avènement du développement personnel et la démocratisation de certains concepts liés à la psychologie, les tests de personnalité ont explosé ces dernières années. Découvrir ses traits principaux et comprendre à quel « type » l’on correspond peut être séduisant… Mais cela comporte certaines limitations. Nous allons donc voir les avantages et les inconvénients du MBTI, de l’Ennéagramme, du Big Five et des autres tests si populaires en ce moment.

Les tests de personnalité, un domaine à la mode en ce moment

Que l’on soit amateur de psychologie ou non, il y a de grandes chances que l’on soit tombé sur des tests de personnalité encensés ces dernières années. MBTI, Ennéagramme, ou encore le populaire « Big Five »… Tous se proposent d’aider les personnes à mieux se connaître…

Mais aussi à mieux se faire connaître des autres ! Sur les sites de rencontre, il n’est pas rare de croiser des acronymes : INTJ, ESTP… Qui sont autant de sésames que nous espérons offrir à ceux qui souhaiteraient comprendre comment l’on fonctionne. Dans le cadre du travail, ces tests sont aussi parfois utilisés pour mieux juger d’un éventuel candidat. Les recruteurs scruteront alors le degré d’introspection ou de perfectionnisme d’un futur collaborateur.

L’autre facteur lié à cette popularité croissante, c’est la montée en puissance des termes de psychologie, du domaine de la santé mentale, et des atypies de fonctionnement en général. À l’heure où de multiples publications nous invitent à savoir si l’on est hypersensible, introverti, HPI… Les tests en ligne séduisent par leurs catégorisations nettes et en apparence précises.

MBTI, Enneagramme, Big Five… En quoi consistent-ils ?

Le « Myers Briggs Type Indicator », ou MBTI, se base sur les théories de Carl Jung et classifie les individus en 16 types de personnalité, en utilisant quatre dimensions : l’extraversion/l’introversion, la sensation/l’intuition, la pensée/le sentiment, et le jugement/la perception. Chaque score est établi de manière binaire et donne un « profil » que l’on peut résumer avec les acronymes cités plus hauts. Le MBTI souhaite être un outil d’exploration, qui donnerait une cartographie du fonctionnement d’un individu.

Quant à l’Ennéagramme, il divise les personnalités en neuf types principaux, chacun ayant ses propres caractéristiques. L’on trouve par exemple les « battants », les « romantiques », les « observateurs » ou encore les « protecteurs ». Là aussi, chaque type a ses motivations de base, ses peurs et ses désirs qui influencent les comportements. Tout comme le MBTI, l’Ennéagramme se propose de classer les êtres humains dans des catégories définies.

Dernier exemple que l’on peut prendre : le modèle des Big Five, ou modèle OCEAN. Il s’agit d’un outil scientifique – ce qui est plutôt rare dans ce secteur. Le test Big Five mesure cinq grands traits de personnalité : l’ouverture à de nouvelles expériences, la conscience de soi, l’extraversion, l’agréabilité et le névrosisme. Le modèle combine ces scores pour établir la manière dont un individu tend à fonctionner.

Nous avons pris ces trois exemples parmi les plus populaires, mais il en existe bien sûr beaucoup plus. N’importe qui peut a priori catégoriser des fonctionnements par l’observation, ce qui peut donner lieu à des tests très variés.

Les avantages des tests de personnalité

Les tests de personnalité séduisent souvent les personnes en recherche d’identité et de compréhension de soi. Il peut s’agir d’un point de départ pour les personnes qui essaient de comprendre leurs fonctionnements et leurs spécificités. Le MBTI, l’Ennéagramme ou encore le Big Five peuvent ainsi permettre de commencer à s’interroger sur ses besoins et ses limites.

Bien que génériques, ils ont ainsi l’avantage de libérer la parole et de susciter des discussions avec ses proches. C’est en tout cas l’avis de Yves-Alexandre Thalmann, professeur de psychologie au collège Saint-Michel, qui livrait sa pensée dans Cerveaux et Psycho (juillet-août 2024) :

« En mettant des mots (même inexacts et trop généraux) sur notre fonctionnement, les typologies offrent un autre bénéfice : elles nous inscrivent dans des catégories où nous ne sommes par définition pas seuls. Notre besoin d’appartenance s’en trouve satisfait. Mieux encore, notre manière d’être se voit “normalisée” »

Lorsqu’on passe un test de personnalité, on cherche en effet souvent l’acceptation de soi autant que la compréhension. Cela peut donc nous confirmer que nous ne sommes pas seuls, et que d’autres individus fonctionnent « comme nous ».

Les limitations de ces tests

Malgré les avantages que l’on vient de citer, ces tests ont cependant leurs limitations, et ils sont parfois fortement critiqués. La principale critique qui est faite, c’est que la majorité d’entre eux ne reposent pas sur des fondements scientifiques solides. Par exemple, le MBTI est souvent pointé du doigt pour son manque de rigueur dans l’élaboration. Il est par ailleurs courant d’obtenir un résultat différent lorsqu’on repasse le test plusieurs fois. La moitié des personnes qui repassent le MBTI obtiendraient ainsi une réponse différente. Cela pose donc problème pour un modèle d’évaluation qui se veut précis.

C’est aussi le cas pour l’Ennéagramme, qui n’est basé sur aucun fondement scientifique, et dont les traits caractéristiques ont été développés par l’intuition de son créateur, Georges Gurdjieff. 

De manière plus générale, réduire une personnalité complexe à quelques traits ou types peut être réducteur et ne pas refléter la réalité. Et ce, même pour les tests qui souhaitent être plus scientifiques, à l’instar du Big Five. Lorsqu’on passe un test de personnalité, il est en effet très humain de vouloir obtenir des résultats flatteurs, ce qui colore nécessairement notre propre jugement.

C’est un point qui est souvent souligné par les tests eux-mêmes. Voici ainsi ce qu’explique le site du « centre d’étude de l’ennéagramme » :

« Le quizz ci-dessous est une exploration. Il n’a pas vocation à déboucher sur un résultat. »

Il est donc important de garder en tête qu’il ne s’agit pas de diagnostics ou de descriptions validées selon un processus rigoureux. Pour certains critiques, le mécanisme en jeu est ainsi plutôt proche de l’astrologie. C’est-à-dire que les résultats attirent par des descriptions suffisamment génériques, qui laissent suffisamment d’espace pour l’interprétation personnelle. Le but étant de valider les émotions et les difficultés des personnes. En cela, ils sont très rassurants, toujours selon Yves-Alexandre Thalmann :

« Que ce soit l’ennéagramme ou le thème astrologique, beaucoup de ces systèmes ne reposent que sur les intuitions de leurs concepteurs. […] Même une approche non validée scientifiquement, voire totalement farfelue, peut faire du bien si elle encourage l’autocompassion. »

Avec une limitation : se faire du bien et valider ses émotions est crucial, mais cela ne fait pas nécessairement avancer. Les tests de personnalité ne devraient donc pas être une fin en soi, mais peut-être un point de départ pour aller explorer des thématiques et solutions pour mieux vivre.

Attention à l’effet Barnum

On le voit, ce n’est pas parce qu’une méthode « fait du bien » qu’elle est fiable ou efficace. Or, dans le secteur du développement personnel, les deux notions sont souvent confondues.

Pour la chercheuse Merve Emre, qui a consacré un livre au sujet des tests de personnalité, la recherche de ce sentiment positif est par ailleurs le but de ces tests : 

« Pour les personnes qui vendent, promeuvent et enseignent en se basant sur [le MBTI], la seule chose qui compte vraiment, c’est si vous êtes satisfaits des résultats qui vous sont donnés. »

La plupart des tests de personnalité se basent en effet au moins partiellement sur ce qu’on appelle l’effet Barnum. Il s’agit d’un biais cognitif très courant, par lequel une personne accepte une vague description de personnalité comme s’appliquant spécifiquement à elle-même.

On l’a mentionné plus haut, l’exemple le plus courant est l’horoscope, qui se propose de classer nettement des personnalités en 12 catégories. Cet effet s’applique donc aussi aux tests de personnalité, d’autant plus quand ceux-ci renvoient une image positive de la personne. Voici un exemple de descriptif suffisamment vague pour que chacun s’y reconnaisse : 

« Vous aimez passer du temps avec vos proches, mais il y a une part de vous qui préfère être au calme, à cultiver votre jardin secret. Vous êtes d’une nature ouverte aux autres, mais si l’on vous fait du mal, vous aurez des difficultés à faire confiance à nouveau. Vos relations sont très importantes pour vous et vous êtes altruiste avec ceux que vous aimez. Vous rêvez parfois à de nouveaux horizons et à des voyages, mais vous savez aussi apprécier votre confort. Sans être matérialiste, vous tenez à gagner suffisamment d’argent pour vivre bien. »

C’est ce phénomène qui induit l’impression qu’une description nous parle et nous décrit parfois fortement. Il peut être utilisé de manière manipulatrice, pour induire de la confiance. Dans le cadre de tests de personnalité, il justifie la « fiabilité » de ces derniers.

Dernier point à mentionner : nous ne sommes parfois pas les personnes les mieux placées pour évaluer objectivement nos fonctionnements. Il est humain de vouloir se montrer sous un bon jour, parfois inconsciemment. Tout test – même scientifique ! – qui se base sur les impressions d’une personne est donc soumis à ce biais.

La place des tests de personnalité populaires

S’il n’y a donc rien de mal à passer des tests de personnalité qui nous permettent d’explorer certaines thématiques, cela peut poser problème lorsque nous nous basons exclusivement sur ceux-ci pour nous comprendre. En effet, ces derniers masquent parfois de réels troubles.

Prenons un exemple : une personne qui reste beaucoup chez elle et qui en souffre parfois pourra trouver un réconfort dans un test MBTI, qui lui apprendra qu’elle est introvertie, ou bien un ennéagramme, qui lui dira qu’elle est dans une position d’« observateur ».

Mais une approche plus scientifique aurait pu déceler chez la même personne une phobie sociale, de l’autisme, ou d’autres caractéristiques. Et ce faisant, apporter des solutions concrètes, qui vont au-delà d’une simple reconnaissance.

Pour conclure, si les tests de ce type sont attractifs, et s’ils peuvent donner certaines clés de compréhension en ce qui concerne notre fonctionnement, ils sont rarement une fin en soi. Parfois, il s’agit d’une étape dans la découverte d’une neuroatypie ou bien d’un autre trouble plus reconnu. Il est donc important de ne pas se baser uniquement sur ces derniers si l’on ressent une souffrance ou bien un décalage avec ses pairs.

Publié par Cam

Journaliste HPI/TSA à la recherche du mot juste et d'un monde plus ouvert à la différence. Créatrice du podcast Bande d'Autistes !
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19 commentaires sur MBTI, Enneagramme, Big Five… Quelle est la fiabilité de ces tests populaires ?