Les troubles du spectre de l’autisme (TSA), ou Asperger, sont encore souvent l’objet de clichés. L’image d’une personne autiste solitaire et incapable de toute forme de relations prédomine, mais elle est bien sûr loin d’être une réalité. Les autistes aussi aiment, et s’ils rencontrent des difficultés spécifiques, cela ne veut pas dire qu’ils sont condamnés au célibat. On fait le tour du sujet, avec quelques conseils pour les personnes concernées.

Autisme et amour : au-delà des clichés

La culture populaire n’est pas toujours très tendre avec la représentation des personnes autistes, et c’est d’autant plus le cas quand il s’agit de relations amoureuses. Sam Gardner dans Atypical, Sheldon Cooper dans The Big Bang Theory ou encore Abed Nadir dans Community : on nous présente souvent de personnages très peu débrouillards en amour, ou chroniquement célibataires.

Il y a aussi souvent un problème de représentation : l’écrasante majorité des films ou séries concernent des jeunes hommes hétérosexuels. Ils sont présentés comme trop maladroits pour être en couple, et leurs échecs sont souvent traités sur le ton de l’humour.

Dans les faits, une réalité évidemment plus complexe

Mais on ne le rappellera jamais assez : il y a autant d’autismes que de personnes autistes : cette vision limitante ne correspond donc pas à une réalité. Certes, les personnes autistes semblent parfois peu intéressées par les relations amoureuses, mais il ne s’agirait que d’une apparence.

Une étude de 2019 du journal Sexuality and Disability, qui a interrogé plus de 450 personnes autistes, indique en effet qu’elles ont le même niveau d’intérêt pour les relations amoureuses que les personnes neurotypiques. Elles l’expriment cependant moins, ou elles ne parviennent pas toujours à trouver d’opportunités de développer une relation amoureuse.

Cela est bien sûr dû à des fonctionnements neurologiques différents, qui influent sur la manière dont nous sommes perçus, ainsi que notre façon d’aborder les autres.

Un fonctionnement amoureux spécifique aux personnes autistes ?

Les personnes autistes ont en effet un fonctionnement neurologique qui rend parfois la compréhension des implicites plus compliquée. Il ne s’agit bien sûr pas d’un déficit intellectuel, mais d’une préférence instinctive pour les informations très factuelles.

Compréhension de l’implicite : une barrière potentielle ?

Or, le secteur des relations amoureuses et de la séduction est, encore plus que les autres, basé sur l’implicite. Nulle surprise donc à ce que les personnes TSA soient parfois perdues. Il faut aussi noter que lorsque deux personnes autistes s’approchent amoureusement, cette barrière n’existe pas nécessairement. On peut donc assimiler cela à un problème de traduction, avec un fossé culturel qui est encore plus marqué entre le monde des neurotypiques et celui des personnes autistes.

Les autistes peuvent être freinés par deux choses : d’une part, ils n’arrivent pas à déterminer instinctivement les règles sociales qui sont en jeu, et de l’autre ils sont souvent isolés. Ils manquent donc de camarades avec qui évoquer le sujet à l’adolescence. Ça crée parfois un retard à l’allumage, avec des personnes qui s’ouvrent aux relations amoureuses et qui en apprennent les codes sur le tard.

Hypersensibilité : un aspect courant chez les personnes neuroatypiques

L’hypersensibilité fait souvent partie du paysage pour les personnes neuroatypiques, dont les autistes. Par exemple, certaines personnes autistes ne supportent pas de toucher d’autres personnes : ça peut donc freiner complètement une relation amoureuse, car trouver quelqu’un qui soit d’accord avec cela peut s’avérer compliqué.

Les sensations de bruit désagréable peuvent aussi être dures à gérer, sans parler du fait d’avoir quelqu’un dans son espace personnel. Lorsque le monde entier est dur à gérer sensoriellement, il est naturel de vouloir préserver ses espaces de répit. On mentionnera aussi l’hypersensibilité émotionnelle, qui peut mettre ce type de profils en difficulté

L’amour : un intérêt spécifique ?

Les personnes autistes peuvent être particulièrement intenses dans leurs relations amoureuses. L’hypersensibilité émotionnelle joue là aussi un rôle. Quand on est autiste, on peut faire de son intérêt amoureux un vrai intérêt spécifique. Cette intensité n’est pas toujours bien perçue, et la personne peut avoir du mal à réaliser pourquoi sa déferlante d’amour n’a pas l’effet escompté.

L’éthique personnelle des personnes autistes peut également être très rigide, et les relations amoureuses ne font pas nécessairement exception à la règle. Ces dernières peuvent ainsi mettre en place des règles strictes pour se rassurer ou faire en sorte que la relation suive des axes prévisibles. En face, il faut donc une personne prête à s’adapter avec bienveillance, sans culpabiliser son ou sa compagne.

Trouver l’amour en tant que personne autiste

On l’a vu, les difficultés des personnes autistes/Asperger en matière de relations sociales s’étendent logiquement aux relations amoureuses. Bien qu’on le répète, cela ne soit en rien une fatalité, on peut lister quelques conseils pour franchir ces obstacles.

Se débarrasser du masque

Les personnes autistes, et en particulier celles qui sont diagnostiquées sur le tard, peuvent avoir maintenu un masque social pendant de longues années, afin de survivre à une société pas toujours très adaptée à leurs particularités. 

Mais pour trouver une personne qui nous convient, on ne peut pas jouer de rôle : pour les personnes autistes, s’ouvrir à l’autre passe donc souvent par le fait de se débarrasser de son masque social. Un processus qui peut faire peur, mais qui nous permet d’attirer des personnes intéressées par notre « vraie » personnalité. Cela passe souvent par un vrai travail de fond, dans lequel on peut se faire accompagner par un professionnel.

Gérer son stress et son anxiété

L’étude de 2019 citée plus haut montrait que si tout un chacun peut connaître du stress et de l’anxiété face à une nouvelle relation potentielle, c’est encore plus le cas pour les personnes autistes. Celles-ci peuvent en effet se sentir perdues ou pleines d’appréhension à l’idée de faire un potentiel faux pas. Comme souvent, gérer sa neuroatypie en situation de séduction passe donc par une gestion de son anxiété.

Trouver des personnes similaires ?

Des observations anecdotiques semblent indiquer que les personnes neuroatypiques ont tendance à être attirées par des profils aux fonctionnements similaires. Pour une personne autiste, se mettre en couple avec une autre personne autiste n’a bien sûr rien d’une panacée. Et on ne suggérera pas de se mettre en couple exclusivement avec des personnes neuroatypiques.

Mais reste le fait que lorsque nous rencontrons des personnes qui fonctionnent de manière similaire, il est plus aisé de faire tomber le masque, et de parler de ses spécificités, rigidités ou difficultés. S’ouvrir à de nouveaux canaux de discussion peut donc être une bonne idée.

Conclusion

Malgré ce qu’on peut lire encore trop souvent, les autistes sont tout autant intéressés par les relations amoureuses que le reste du monde. Ils expriment cependant leur intérêt de manière différente, et peuvent rencontrer des difficultés spécifiques dans la mise en relation.

Comprendre qui l’on est et se montrer sous son vrai jour semble être clé pour se mettre en relation, tout comme pour les autres formes de neuroatypies. Par ailleurs, des plateformes comme Atypikoo peuvent permettre de trouver des personnes au fonctionnement similaire, afin d’échanger sur le sujet.

Publié par Cam

Journaliste HPI/TSA à la recherche du mot juste et d'un monde plus ouvert à la différence. Créatrice du podcast Bande d'Autistes !
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6 commentaires sur Asperger et amour : les autistes aussi se mettent en couple