La théorie des langages de l’amour a été popularisée depuis le début des années 1990, avec la parution du livre éponyme de Gary Chapman. Son modèle est encore aujourd’hui considéré comme particulièrement pertinent pour comprendre les relations de couple. Alors, parlons-nous tous des langages amoureux différents quand nous sommes en couple ? Les comprendre peut-il nous permettre d’avoir des relations plus apaisées ? On décrypte tout cela dans cet article, avec les limitations de ce modèle populaire.
Les langages de l’amour sont une classification développée par l’auteur Gary Chapman dans les années 1980. L’auteur explique dans son livre que tout un chacun communiquerait son amour de manière différente, et que les tensions en couple sont souvent dues à ces différences. Certains préféreraient ainsi verbaliser leur amour, pour d’autres cela passerait par des gestes, ou encore de petites attentions, etc.
L’ouvrage défend une idée clef : les sentiments amoureux, mêmes forts, ne suffisent pas, et une relation se travaille à travers des actes et des gestes. Mais encore faut-il que ces derniers soient compréhensibles. L’auteur explique ainsi :
« La sincérité n’est pas suffisante. Si nous voulons bien communiquer notre amour, nous devons être prêts à apprendre le langage affectif fondamental de notre conjoint. »
En effet, plus le « langage affectif fondamental » de notre conjoint serait différent du nôtre, plus cela pourrait créer des problèmes dans un couple qui s’aimerait pourtant sincèrement. Le tout serait donc d’apprendre quels langages affectifs nous parlons, pour être certains que ceux-ci soient compréhensibles de chaque côté.
Alors quels sont les 5 langages de l’amour ? La classification de Chapman est la suivante :
L’être humain n’étant pas aisément classifiable, il est bien sûr possible que plusieurs langages nous « parlent ». En général, nous disposerions de plusieurs langages principaux, tout comme notre conjoint.e. Pour les trouver, on peut se poser les questions suivantes :
La prise en compte de ces différences de communication peut d’ores et déjà permettre d’identifier certains problèmes récurrents. Ensuite, il s’agit de travailler à deux pour mieux se comprendre.
Chapman encourage les couples ayant identifié leurs limitations à les dépasser en prenant en compte les besoins de l’autre. Par exemple, une personne qui verbalisera peu son amour pourra commencer à envoyer plus de messages d’affection à son ou sa conjoint.e. Une autre dégagera plus de temps dans sa semaine pour passer des moments d’oisiveté en couple.
La notion clef étant bien sûr – comme dans toutes les affaires de couple – la communication. L’idée n’est pas d’appliquer ces nouveaux axes de communication de manière mécanique, mais bien d’en faire un point de départ pour mieux comprendre l’autre.
Le livre de Gary Chapman est un best-seller depuis près de trente ans, on peut donc estimer sans trop se tromper qu’il parle à bon nombre de lecteurs. On nuancera cependant le modèle, qui a ses limitations en termes de compréhension des relations amoureuses.
Tout d’abord, les langages de l’amour peuvent réduire l’expression de l’affection à des cases à cocher, voire à une compétition, comme le souligne la thérapeute Linda Carroll dans un article consacré au sujet. Cette « mécanisation » de l’expression de l’affection peut alors devenir un poids, qui se rajoute à une relation déjà en difficulté.
Autre limitation : la théorie a été créée avec une vision du couple très hétéronormée et « classique ». Gary Chapman étant à l’origine un pasteur, il propose une vision centrée sur un couple hétérosexuel et cisgenre. Une publication sur son site – depuis supprimée – expliquait ainsi aux parents d’enfants « gays » :
« Les hommes et les femmes sont faits l’un pour l’autre – c’est le dessein de Dieu. Tout ce qui sort de cela s’exprime au-delà du dessein principal de Dieu. »
L’autre limitation des langages de l’amour, c’est bien sûr que le concept s’adresse à des personnes neurotypiques. Une personne autiste peu verbale aura ainsi bien du mal à exprimer son amour de manière orale, ou même à l’écrit. Et une personne avec TDAH pourrait rencontrer des difficultés pour se souvenir de donner régulièrement des cadeaux. Les individus concernés par ces fonctionnements neurologiques différents ne sont pour autant pas condamnés à sempiternellement frustrer leurs conjoint.e.s.
Une autre critique, plus large, a trait à la manière dont nous considérons le couple. Le modèle de Chapman implique que notre conjoint.e devrait remplir tous nos besoins affectifs, en s’adaptant à nous, et inversement. Or on sait bien que diverses personnes de notre vie comblent différents besoins affectifs, et que c’est même plutôt sain. Sans parler des couples qui n’en sont pas, des couples libres, des « trouples », et de tous les autres arrangements entre adultes consentants qui existent.
Comme tout best-seller de la catégorie « développement personnel », Les langages de l’amour est un ouvrage qui touche un large public parce qu’il simplifie des concepts compliqués. Il a donc ses limitations. Mais le modèle développé peut cependant être un bon point de départ pour s’interroger sur ses propres besoins et ceux de la ou les personnes avec qui l’on partage sa vie.
Pour les personnes neuroatypiques en particulier, qui ont déjà souvent des difficultés à se sentir valides en couple, il faudra cependant faire attention à ce que cela ne fasse pas surgir des sentiments d’inadéquation. Tout comme un diagnostic, une relation ne se résume pas à une liste de cases à cocher, même si celle-ci peut nous donner de bons indicateurs sur la manière dont nous fonctionnons.
32 commentaires sur Relations amoureuses – Parlez-vous le même langage de l’amour ?