Allons nous amuser un peu par un voyage fascinant dans le cerveau de la personne ayant un haut potentiel intellectuel

Neuroscience

Le cerveau des personnes surdouées

La moyenne de l’intelligence humaine, si nous nous fions aux tests de quotient intellectuel, est de 100 points de QI. La plupart des gens se retrouvent entre les scores de 90 à 110. Environ 2,5% de la population ont toutefois un QI fort au-dessus de la moyenne, soit de 130 points et plus. Cette particularité cognitive s’appelle le haut potentiel intellectuel. Nous entendons aussi régulièrement les termes douance ou les surdoués pour définir ce cerveau intellectuellement efficace. À partir de 145 de QI et plus, on peut qualifier la personne de hautement douée intellectuellement. À 160, exceptionnellement douée. Et 175 de QI et plus, profondément douée intellectuellement, ce qui représente 0,00003% de la population mondiale. Plusieurs hommes et femmes surdoués ont marqué l’histoire, mais les personnes ayant un haut potentiel intellectuel se retrouvent partout, dans tous les domaines, représentant un peu plus de deux personnes sur cent.

La vraie différence du HP est neurobiologique

Depuis longtemps, "les cerveaux" que l’on appelait génies à l’époque, attirent l’attention des scientifiques. Quelles différences y a-t-il entre un cerveau dans la norme et ceux des surdoués ?

Première donnée frappante : le cortex cérébral se développe plus lentement chez les doués, à l’inverse de ce que nous aurions pu penser. Grâce entre autres à Albert Einstein, nous savons maintenant que les cerveaux très intelligents ne sont pas nécessairement les plus gros. Chez les enfants surdoués, le cortex cérébral s’épaissit et se développe lentement mais progressivement jusqu’à l’adolescence. Et c’est plutôt l’inverse chez les enfants typiques : ils ont un cortex plus épais et cette zone diminue en taille au début de l’adolescence. Pour faire simple, le cerveau d’un enfant ayant un potentiel intellectuel élevé devient plus sophistiqué, spécialisé et développe plus de matière cérébrale avec le temps que l’enfant typique.  

Les personnes surdouées ont un plus grand volume de matière grise dans 28 régions du cerveau. La matière grise joue un rôle très important dans le traitement de l’information et est donc directement liée à l’intelligence. Les surdoués ont donc de meilleures capacités pour traiter les données, pour les analyser et les comprendre. La matière grise augmente nos capacités de raisonnement, de concentration et de gestion des stimuli sensoriels. Les personnes ayant un potentiel intellectuel élevé, ont ces zones spécialisées plus développées que la moyenne.

De plus, les gaines de myéline qui entourent les axones des neurones et favorisent les influx nerveux, sont plus épaisses. Cela fait en sorte d’augmenter la vitesse de conduction. Aussi, il y a davantage de matière cérébrale dans le cerveau HP, particulièrement dans le lobe frontal. Le lobe frontal est décrit comme le chef d’orchestre du cerveau. Il contrôle nos comportements complexes, comme la prise de décision et le langage. Il est également le centre de la mémoire, du raisonnement analogique (les associations d’idées) et de la créativité. Le lobe frontal fait en sorte que toutes les sphères du cerveau jouent ensemble, de façon harmonieuse.

Un autre point qui démarque les personnes surdouées est une plus grande connexion neuronale. La matière grise stocke et gère les informations. La matière blanche quant à elle, qui contient les cellules gliales, la fait bouger. Elle permet la connexion des neurones et de créer des routes entre eux. Ce trait est celui qui démarque le plus le cerveau surdoué : il a une énorme efficacité neuronale. Ce type de cerveau fabrique des autoroutes de liens ! En plus, leurs autoroutes sont connectées entre elles, ce qui en fait un réseau vaste et hyperconnecté, où tout va extrêmement vite. En plus de la vitesse de conduction augmentée, le cerveau HP dépense moins d’énergie pour réfléchir. Il est un cerveau économe ce qui lui permet de garder des calories en banque pour penser encore plus !

Les chercheurs ont aussi constaté que le cerveau surdoué a une plus grande neuroplasticité, ce qui serait assurément sont plus bel avantage. Il est un cerveau qui ne cesse de se développer. Un cerveau qui se nourrit constamment de nouveaux apprentissages.

Les cerveaux doués ont 28 régions cérébrales associées à l’intelligence supérieure

Des neuroscientifiques ont proposé un modèle d’intelligence cérébrale qu’ils appellent la théorie de l’intégration fronto-pariétale. Ce modèle a été développé par l’analyse de 37 études de neuroimagerie qui mesurent l’intelligence incluant l’intelligence cristallisée, l’intelligence fluide et le raisonnement de jeu.

L’analyse de 37 études de neuroimagerie a révélé 28 régions cérébrales associées à une intelligence supérieure. Ce modèle représente l’incorporation et la convergence entre les cortex d’association sensorielle pariétale et les lobes frontaux du cerveau. Ces régions reliées par de la matière blanche transforment les informations d’une région du cerveau à une autre. La matière blanche contient entre autres des cellules souches qui permettent la création de nouveaux liens. Plus la « banque de cellules souches est remplie », plus le cerveau peut apprendre et se développer.  

Plus les recherches avancent, plus les neuroscientifiques constatent à quel point la matière blanche et ses cellules gliales ont un rôle à jouer au niveau de l’intelligence, une autre chose que les doués ont en plus grande densité. Mais qui dit autoroutes rapides et interreliées, dit une condensation importante d’informations qui peut parfois submerger le cerveau HP, un peu comme une surchauffe. Le cerveau peut finir par être trop actif et agité. Il doit alors prendre le temps de se calmer un peu pour ne pas s’endommager.

Preuve d’une intelligence émotionnelle accrue chez les personnes à QI élevé

« L’intelligence émotionnelle est décrite comme ayant augmenté la théorie de l’esprit, augmentant l’empathie, la capacité de comprendre et d’anticiper ce qu’une autre personne vit et / ou ressent. Les individus surdoués sont souvent considérés comme ayant une capacité émotionnelle et une intelligence émotionnelle accrues. Il est courant que ces individus décrivent les choses de manière plus intense et plus profonde, leurs émotions sont exacerbées par rapport à l’intelligence moyenne. Il existe des preuves pour soutenir que les individus surdoués ont des différences structurelles, morphologiques et de performance dans leur cerveau qui contribuent à ces expériences émotionnelles améliorées.

Les scientifiques ont réalisé une étude utilisant l’imagerie par tenseur de diffusion (DIT) pour déterminer la structure de la substance blanche et les étendues du corps calleux, du cingulum, du fascicule non clos, du rayonnement optique et du tractus corticospinal chez les individus et ont déterminé les corrélations avec une échelle complète. Ils ont constaté que les individus à QI élevé montraient une augmentation du volume du fasciculus droit non clos et étaient importants pour la base neurale d’une intelligence élevée. Le bon fascicule non fini est essentiel pour l’intelligence émotionnelle et son rôle dans l’empathie (Decety et Ickes, 2009; Olson et al., 2015). »

Poursuivons avec la motivation

Que les plus grands motivateurs se le disent, même les phrases pseudo-philosophiques les plus positives ont peu d’impact dans la motivation. Les réponses pour trouver la motivation sont encore une fois dans le cerveau.

La motivation est le moteur de toute action. Mais encore faut-il en avoir pour agir, car on est motivé ou on ne l’est pas ! Tout se joue dans nos émotions. Si nos émotions sont stimulées de façon positive, comme la joie ou la fierté, les chances que nous soyons motivés augmentent. Mais il faut aussi d’autres ingrédients. Notre histoire de vie a façonné notre cerveau, et donc la motivation est bien différente d’un individu à l’autre. Les émotions peuvent nous motiver, mais chacune à sa façon. La joie est motivante car elle nous fait vivre du plaisir. Elle nourrit notre système de récompense, et nous voulons toujours en ravoir. Donc qui trouve la joie dans sa vie, trouve la motivation en général. La peur est aussi très persuasive. Si nous ne voulons pas perdre quelque chose, ou que nous avons peur qu’il nous arrive quelque chose, nous aurons la motivation suffisante pour faire ce que nous avons à faire pour éviter la situation. Et finalement, la frustration est elle aussi motivante. Elle nous amène à vouloir changer les choses, à se dépasser ou à vouloir dépasser les autres. Elle nous amène à nous rebeller et à agir. Ne serait-ce que pour prendre notre revanche après avoir perdu à un jeu par exemple.

Au niveau du cerveau, des zones spécifiques vont s’occuper de notre motivation : le néocortex et le cortex frontal, des zones bien développées chez le doué. Le premier est la partie qui analyse et le deuxième pèse le pour et le contre et ainsi, facilite la délibération. Il est aussi la liaison entre le néocortex et le cerveau limbique, pour les émotions.

La créativité c’est l’intelligence qui s’amuse - Einstein

La créativité est la capacité d’une personne à imaginer, à développer un nouveau concept ou à découvrir une solution nouvelle à un problème. Elle se définie par l’originalité dans la manière que la personne a associé les choses, les idées et les situations qu’elle a eues pour atteindre son résultat. Elle s’observe dans les arts, mais aussi par les nouvelles idées des chercheurs, des entrepreneurs et des inventeurs. En fait, la créativité est la capacité à imaginer et à produire une grande quantité de solutions, d’idées et de concepts, qui amènent l’efficacité et le changement.

Il y a une grosse différence entre utiliser nos connaissances pour faire quelque chose, versus créer quelque chose.  Les connaissances sont des données déjà enregistrées, tandis que la créativité est en fait une construction de nouvelles données. L’intelligence et la créativité sont donc deux complices essentiels. Alors y a-t-il des cerveaux davantage façonnés pour être créatifs?

Le cerveau a trois réseaux différents mais interreliés en ce qui concerne la créativité. Le premier est le réseau par défaut, le réseau exécutif et le réseau de saillance. Des chercheurs de Harvard et Yale ont utilisé l’IRM pour prédire le niveau de créativité d’une personne. Ils ont comparé les scanners cérébraux des participants engagés dans un travail créatif et ceux dans une tâche neutre. Les chercheurs ont trouvé plus d’activité entre ces trois zones qui fonctionneraient en équipe : le réseau en mode par défaut génère des idées, le réseau de contrôle exécutif les évalue et le réseau de saillance aide à identifier les idées pertinentes qui sont transmises au réseau de contrôle exécutif.

Par cette étude, les chercheurs ont utilisé l’IRM pour prédire le niveau de créativité d’un individu, ce qui s’avère possible. D’autres études suggèrent que la créativité est à la fois le résultat de la génétique chez la personne mais aussi de l’expérience de vie. Tout le monde a donc le potentiel de devenir plus créatif et si la génétique ne vous a pas favorisé, vous pouvez tout de même la développer.

Au niveau cérébral, il semble que les personnes créatives aient des connexions plus courtes entre les deux hémisphères du cerveau, soit la région du corps calleux. Un autre avantage neurologique du cerveau HP. Ce qui pourrait aider à donner plus de temps aux idées pour se développer, les neurones « ayant moins de chemin à faire » pour se parler. D’autres études montrent des liens entre un esprit créatif et à plus de matière grise dans le cerveau, ainsi que des niveaux plus élevés de sérotonine. Encore une fois, cette différence est un avantage qu’a le cerveau ayant un haut potentiel intellectuel.

Mais la créativité n’est pas que neurologique ou génétique. Des études sur des enfants ont démontré que regarder quelqu’un d’autre être créatif, regarder un film fantastique ou jouer à un jeu non structuré encourage de nouvelles perspectives, une pensée analytique, ainsi que cette fameuse créativité.

Cependant, cultiver sa créativité ne doit pas se faire exclusivement dans l’enfance. Essayer de nouvelles choses et apprendre régulièrement sur des nouveaux sujets, peut aider à stimuler la créativité. Des séances de remue-méninges au travail comme moyens de stimuler la créativité sont aussi efficaces. La pensée divergente ou la capacité d’explorer plusieurs solutions à un problème est une autre façon de nourrir l’esprit créatif.

Mais il y a aussi des éléments qui freinent abruptement la créativité. Deux des plus évidents sont le stress et les contraintes de temps qui enterrent inévitablement l’innovation. Aussi de rester toujours au même endroit et faire toujours les mêmes choses, la bonne vieille routine en fait, sont des comportements qui endorment la créativité. De même que la fatigue et le manque de sommeil. La faible d’estime de soi et de confiance en nos capacités, ainsi que la peur d’échouer, la fige complètement. Ce qui pourrait expliquer entre autres, pourquoi certaines personnes douées sont créatives et actives dans leur cheminement personnel, versus d’autres qui par des épreuves de la vie, se sentent souffrantes et « éteintes ».

Mais comme feu, les braises du HP peuvent se rallumer ! Le potentiel cognitif doué est toujours présent. Il demande cependant à être nourri de façon sereine et positive. Pour que l’ensemble du cerveau soit en harmonie et performant. Et seulement à ce moment, le feu brûle de toutes ses forces, et le potentiel est activé !


RÉFÉRENCES

Pascal Auclair, « Enfant précoce : une étude démontre enfin leur spécificité cérébrale (Lyon) »; Yohan Demeure, « Comment fonctionne le cerveau des enfants surdoués »

https://www.pnas.org/content/115/5/1087
Les élèves à haut potentiel intellectuel par Roselyne Guilloux version E-Book, Éditeur Retz, février 2016
https://www.ordrepsy.qc.ca/-/que-se-passe-t-il-a-l-interieur-du-cerveau-intelligent-
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3184407/
https://ghfdialogue.org/the-gifted-brain-revealed-unraveling-the-neuroscience-of-the-bright-experience/

Publié par Rachel

Auteure et propriétaire du site le Centre Hapax, dédié aux besoins des enfants et des adolescents. Rachel a écrit des livres sur l'autisme et sur la douance dans la collection la boîte à outils des éditions de Mortagne. À travers ses livres, ses articles et son blog, elle prône la beauté de la neurodiversité humaine.
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